Chine : le Sichuan, la culture tibétaine
Bercés (ou réveillés) par les prières des Tibétains dans le bus de nuit, on atterrit à l’aube à Xiewu, petite ville du Qinghai aux portes du Sichuan à 3800 m d’altitude. Dès nos premières bornes dans le Sichuan, on est submergé par la culture tibétaine: les maisons, les temples accrochés aux montagnes, les tenues traditionnelles, même pour les enfants qui vont à l’école … On se demande si on n’arrive pas un jour de fête.
Et bien non! Au fil des kilomètres sur le plateau tibétain, des cols à plus de 4000 m et des vallées splendides, on réalise tout simplement que la culture Tibétaine est fortement ancrée dans le quotidien. Cette partie de la région du Sichuan fait partie du Tibet historique, qui correspond au haut plateau de l’Himalaya. Aujourd’hui, ce « grand Tibet » est divisé dans cinq régions actuelles de la Chine: le Qinghai, le Yunnan, le Gansu, le Sichuan et le Tibet autonome, qui est conflit avec le gouvernement chinois et dont on entend beaucoup parler dans les médias.
Au Sichuan, les Tibétains semblent pratiquer leur religion en toute liberté. Très pieux, on les croise souvent à réciter en rythme leurs mantras (prières répétitives) tout en faisant la cuisine, en ramenant les vaches à l’étables, à l’aide de leur chapelet ou de leur moulin à prières portatif (qu’on aime nommer « bilboquet »). Même accrochés à leur téléphone, ils continuent de prier!
En suivant les cairns sur le bord de la route et les panneaux écrits en tibétain, nos coups de pédale nous mènent de Xiewu à Garze, puis à Litang, sans voir le temps passer. Les paysages varient et nous enchantent. On passe de grands plateaux dénués de végétation, où les yacks pâturent aux gorges escarpées remplies de conifères. Les aigles et les vautours ne sont jamais loin au dessus de nos têtes.
Les temples se dressent dans chaque village comme les églises chez nous. Veillez bien à ne pas marcher sur le palier, à tourner dans le sens des aiguilles d’une montre dans chaque pièce et même à faire un petit don si possible devant chaque statue (et Dieu sait qu’elles sont nombreuses!). Le Bouddha voit d’un bon œil toute offrande aussi farfelue soit elle, du genre alcool, poulet grillé, écharpe de soie, fruits, canettes de soda… Un régal !
Sur les montagnes, des drapeaux de prières sont tissés comme des toiles d’araignée et les moulins à prière sont placés dans les petits ruisseaux. Ils sont malins ces Tibétains, ils font prier la nature pour eux: chaque mouvement des drapeaux engendré par le vent, et chaque tour de moulin permet de répéter leurs prières. Alors que dans les rues, les moines se baladent avec leurs baskets Nike et leur Smartphone: quel anachronisme.
La Chine, et particulièrement le Sichuan, c’est aussi le pays de la moto. Ici, pas besoin de monospace : toute la famille tient sur un deux roues ! Même les vachers poursuivent leurs yacks à moto pour rentrer le troupeau. Il faut savoir que les yacks grognent plus comme un cochon qu’ils ne meuglent (leur nom en tibétain signifie d’ailleurs bœuf grognant)! Mais ce ne sont pas les seuls bruits qui nous surprennent. En Chine, les règles de politesse et la tolérance au bruit sont complètement différentes qu’en Europe. On peut roter, cracher, faire du bruit en pleine nuit : personne ne bronche… sauf nous !
A 4000 m d’altitude, on a le luxe de pédaler sur de l’asphalte balayé aux petits oignons (comme sur les autoroutes..) et parfois sur des routes en cours de construction avec des méthodes pour le moins contradictoires. Des machines modernes travaillent à toute allure, suivies par des armées de petites mains, qui réalisent des travaux surprenant : triage de cailloux, tamisage… On rencontre souvent des femmes assignées à des tâches manuelles, qui chez nous sont réservées aux hommes (ferraillage, maçonnerie…), mais aussi des hommes qui cuisinent à la maison. Quel plaisir de découvrir un pays dans lequel la femme, tant à la maison que dans le travail, semble proche de l’égale de l’homme.
L’architecture des maisons embellit le paysage et le style des façades évolue au fil des vallées jonglant entre le bois, le torchis, les pierres, les briques.. L’intérieur est toujours immense, avec des étables au rez-de-chaussée, de grandes hauteurs sous plafond, de (très) raides escaliers, et la photo de Lhassa (« Terre des Dieux ») qui trône au dessus des casseroles. C’est aussi agréable de voir que les nouvelles constructions se font toujours à la manière traditionnelle. Les Tibétains mangent très sobrement, avec les denrées qu’on trouve sur le plateau comme des boulettes de farine d’orge crue avec du beurre, du thé au beurre, du yaourt de yack.
Alors qu’on savoure la réputée cuisine Sichuanaise (épicée mais avec riz à volonté, le bonheur des cyclistes !), on rencontre les Pralines, un couple de cyclos Français. Avec eux, on se régale ! N’importe où, même dans les endroits les plus improbables, telle que la décharge en haut d’un col en pleine nature, où des chinois nous invitent à un festin pour le picnic. On n’aurait pas choisi cet endroit pour se poser! En tout cas on se marre bien et on retrouve le charme du voyage à 8 roues.
Une fois de plus, la végétation change. L’odeur des pins et le chant des oiseaux nous rappellent le Sud de la France. Puis les forêts de feuillus commencent à perdre leurs feuilles, l’automne arrive ! Chaque montée de col se fait plus facilement grâce aux sourires, aux pouces en l’air et aux « Djashidele » (bonjour en tibétain) des voitures qui nous dépassent.
Notre dernière étape sur le plateau tibétain nous mène à la ville de Shangri-La dans le Yunnan, qui devrait rappeler des souvenirs à Ben, passé par là il y a quelques années. L’incendie d’une grande partie du vieux centre rend cette ville quasiment méconnaissable. L’authenticité de la ville s’est perdue dans l’importante masse de nouvelles constructions, destinées plus aux touristes qu’aux locaux. On se repose et visite un dernier temple cocasse, nommé « Temple des cent poulets » pour dire au revoir à la culture tibétaine, qui nous a tant fait vibrer. Après un « à bientôt » à nos bons copains, on s’en va prendre le bus pour Kunming, porte d’entrée vers l’Asie du Sud-est.
PS : Certaines photos de cet article sont usurpées au talent de photographe de Martin. Si vous en voulez plus, vous pouvez vous rendre sur lespralinesenvadrouille.com
7 réflexions sur « Chine : le Sichuan, la culture tibétaine »
Trop beau cela donne tellement envie de s'y rendre allez c'est décidé notre prochain voyage toujours d'aussi belles découvertes et rencontres vous avez du vous régaler ! Et bravo pour le col à 4700m j'adore la photo en noir et blanc des mantras au téléphone. De grosses bises Vero
Au top votre article les Chouchous! On a hâte de lire vos aventures au Laos ! Des bibis
Magnifaïk !! Ca me rappelle l'ambiance du Nepal, ca a du etre une partie très speciale de votre voyage..
et le yaourt de yack alors ? Un vrai delice ..?
profitez bien de l'Asie du sud-est, le temps risque de s'accélerer 😉
a bientot pour de nouvelles aventures
Bonjour Marina et Benoit
Après de nombreux visionnages de votre article sur le Sichuan voici mes impressions. Cette fois ci j’ai été impressionnée par votre prose. Je trouve que votre récit est chouette et détaillé il ferait plaisir à vos anciens profs de Français.!!
Les photos et la luminosité 7sont exceptionnelles. Vos potes les pralines ont l’air d’avoir du gaz aussi.
Je commence à me dire que ça va être dur de voter pour la meilleure photo et le meilleur article du voyage.
Mais avant cela, j’ose lancer un appel aux nombreux lecteurs anonymes ou pas , fidèles et assidus çà c’est sûr vu le nombre de connexions ,pour que tout le monde poste au moins un commentaire d’ici la fin du voyage….
Je vous embrasse tous les deux et vous remercie de prendre du temps pour nous informer sur tous ces pays d’Asie et leurs populations et nous régaler à chaque article.
Bisous bisous
Florence
Marina et Ben bonsoir
Je pensais avoir laissé un commentaire mais non !!!
Je vois que vous avez passé du bon temps avec les chinois et les Pralines. Je trouve cela super. Une expérience de plus à votre palmarès.
Je vois que les guibolles se portent bien !!! Malgré les pentes raides !!
Bises à vous deux
Hello !
Je viens de rattraper tout mon retard sur votre blog (les flash back de l'Iran et la Chine), et ça fait vraiment rêver !!! Que ce soit les photos, les paysages, les rencontres, ça donne vraiment envie de voyager 😀
Un petit plus pour la Chine, où j'ai vraiment l'impression de revenir 5 ans en arrière ("bu la da" est une des premières choses que j'avais appris à dire ^^)
J'espère que vous avez pris un burger de Yack à Shrangri-la et profité à fond des paysages autour de cette ville (c'est triste pour le centre, je me rappelle d'une danse mémorable là bas…).
J'attends avec impatience la suite de vos aventures, avec notamment le Yunnan 😀
A bientôt !
salut marina !
ça fait tellement rever le tibet, cette culture, ce calme et ce rapport à la nature et aux autres !
merci pour l'article !
bisous
Matthieu D